Le luciférien
Jean-Paul Bourre appartient à la mouvance européenne identitaire et
néo-païenne de l'extrême droite. « Dès 1965, écrit-il, j’ai fait la
connaissance psychédélique du diable, en quelque cinq cents microgrammes
d’acide. L’expérience des hallucinogènes - comme le L.S.D. - avait
ouvert une brèche dans les vieilles habitudes. On croyait que tout était
possible, que l’univers était un bouillonnement de forces, d’énergies,
que rien n’existait, en dehors de cette danse incroyable, et que les
dieux et les démons nous offraient d’autres voyages, plus haut, plus
loin. »
Il y a quelques
années, poursuit Jean-Paul Bourre, R.L. m’écrivait personnellement afin
de me convier à la grande assemblée luciférienne. Je ne répondis pas à
sa lettre, car pour moi Lucifer, l’Ange prométhéen, ne pouvait descendre
au cœur des petits intérêts personnels où l’initiation véritable n’est
plus qu’une couverture littéraire pour transporter les armes, physiques
celles-là, d’une autre subversion.
« Nous devons
lutter, m’écrivait-il, contre les fils du Dragon noir, communistes,
matérialistes, tarés, etc, pour que revienne le temps de notre race et
son culte solaire, et si nous portons aussi, cher frère, le nom d’Église
de Mithra, en réalité nous vénérons le Grand Lug, car Lug = Mithra = Râ
= Lucifer : le même porte-emblème de la flamme sous divers noms à
travers les âges, Lug étant celui du Verseau. » Lucifer revenait sous le
nom de Lug, divinité du feu chez les anciens Celtes, et l’Ordre vert
déclarait la guerre à l’humanité ordinaire, à l’homme de tous les jours
appelé, dans les dossiers secrets de l’Ordre, humain type II, et cela au
nom d’un Ordre supérieur et racial lorsque la roue solaire flottait sur
Nuremberg.
« Historiquement, affirme L. en créant sa légende, j’ai fondé l’Ordre vert la nuit du 6 décembre 1970, avec quelques courageux adhérents. L’Ordre resta dans l’ombre pour des raisons ésotériques internes et ne fut rendu public qu’à partir du mois de septembre 1972. Depuis, de nombreuses adhésions nous arrivent de partout et divers mouvements celtes bretons sont entrés en contact avec l’Ordre vert. Qu’est-ce que l’Ordre vert ? C’est la tradition luciférienne des Celtes (!); c’est aussi le culte du dieu solaire mazdéen Mithra; la nature qui se dresse contre les tares de la pseudo civilisation, et contre les faux dogmes des Églises et des religions d’imitation! » Et de conclure, dans la langue celte : Mar n’ouzez-te te ket me oar ! (« Si tu ne sais pas, moi je sais) [...]
Le 14 mai 1975, les représentants des diverses associations lucifériennes étaient présents à Bruxelles, au temple de l’Ordre vert, afin de sceller la charte d’unification des Légions de Mithra (fer de lance de l’Ordre vert). [...]
Création de
l'internationale luciférienne
«
Les temps sont venus de faire une UNION SOLIDE de toutes nos
sociétés, il est grand temps que les fils et les filles de
l’Hyperborée dressent la flamme des temps
nouveaux et du surhomme divin, héritier du Graal et de la couronne
boréale. De Samballah, la cité sainte de l’Agartha, arrive ce
message Polaire : UNISSEZ-VOUS !… »
Cet
appel,
explique Jean-Paul
Bourre, lancé de Bruxelles en 1975 par
l’Ordre vert en vue de préparer l’avènement d’une
Internationale Luciférienne, eut des répercussions qui dépassèrent
de loin le monde de l’Occulte.
Si
nous tracions la ligne souterraine partie de Bruxelles un jour de
l’année 1975, nous assisterions à de curieuses rencontres, tant
occultes que sociales, liées entre elles par l’ordre impénétrable
de Lucifer : unification des loges d’obédience luciférienne,
camps d’entraînement de militants néo-nazis quelque part dans les
monts d’Auvergne, réunions occultes à Paris, rue d’Assas, où
l’on retrouve le mercenaire J.K. en croisade pour l’Occident, et
certains amis autour d’une table tournante, puis la mort de Franco
et le départ d’un petit groupe de nostalgiques vêtus de noir
quittant leur siège parisien, la rencontre dans une banlieue de
Madrid du mage Lopez Rega, alors en exil, ancien bras droit de Juan
Perron et spécialiste de la magie sexuelle… Tout cela sous la
bannière noire de Lucifer, même si pour certains des acteurs de ce
drame, cette bannière porte parfois d’autres couleurs... [...]
Pour
l'Ordre vert, il est indispensable d’unir toutes les forces
polaires et solaires avant l’ère du Verseau, et il faut que
l’homme nouveau – le surhomme – se tienne prêt à prendre le
destin de l’humanité en main, car lorsque le moment le plus
critique de l’Âge noir sera venu, il n’y aura plus qu’un
peuple porteur de la flamme : NOUS. Il faut créer un ordre de
chevalerie aryen, et former une élite de Supérieurs détenant les
secrets que possédaient nos ancêtres de l’Empire polaire.
Pour
R.L., grand maître de l’Ordre vert (dit encore R. Lug), la
naissance de l’homogalacticus ne peut se faire que par une intense
préparation tant sociale que magique. Dès lors, la prise du pouvoir
politique, chimérique aux yeux de l’homme de
la rue, semble s’annoncer évidemment logique.
« Historiquement, affirme L. en créant sa légende, j’ai fondé l’Ordre vert la nuit du 6 décembre 1970, avec quelques courageux adhérents. L’Ordre resta dans l’ombre pour des raisons ésotériques internes et ne fut rendu public qu’à partir du mois de septembre 1972. Depuis, de nombreuses adhésions nous arrivent de partout et divers mouvements celtes bretons sont entrés en contact avec l’Ordre vert. Qu’est-ce que l’Ordre vert ? C’est la tradition luciférienne des Celtes (!); c’est aussi le culte du dieu solaire mazdéen Mithra; la nature qui se dresse contre les tares de la pseudo civilisation, et contre les faux dogmes des Églises et des religions d’imitation! » Et de conclure, dans la langue celte : Mar n’ouzez-te te ket me oar ! (« Si tu ne sais pas, moi je sais) [...]
Le 14 mai 1975, les représentants des diverses associations lucifériennes étaient présents à Bruxelles, au temple de l’Ordre vert, afin de sceller la charte d’unification des Légions de Mithra (fer de lance de l’Ordre vert). [...]
Julius
Evola, ce philosophe italien qui connaissait très bien la pensée
prométhéenne, affirmait qu’au-delà des polémiques raciales qui
agitent de nombreux mouvements traditionalistes seule
existait pour lui la race mentale des Éveillés. Cette
théorie n’est pas du tout celle de l’Ordre vert, dont le racisme
ne s’exprime pas à mots couverts. R.L. déclare sans ambiguïté :
« La Pureté du sang et des coutumes est l’une des choses à
défendre, car le sang biologique peut influencer le comportement
d’un individu; il faut bien admettre que les chromosomes d’un
Aryen diffèrent de
ceux d’un Bantou… » [...]
Les
commandos du diable.
Ma
tentative de réhabilitation du luciférisme peut s’expliquer par
la démystification de certaines organisations satanistes qui n’ont
rien à voir avec l’aristocratie mentale du dépassement de soi,
avec la véritable ascèse luciférienne.
Comme
je l’écrivais dans un magazine ésotérique (l’Autre Monde, le
magazine de l’étrange, n° 11) en prenant comme exemple le
nazisme, qu’un auteur moderne rattache à Lucifer (André Brissaud
: « Les Agents de Lucifer ») :
Lucifer
(Lux – Fer), le Porteur de Lumière, est l’incarnation d’une
magie du feu, de type prométhéen, qui n’a rien à voir avec la
déviation sataniste du nazisme. C’est vouloir confondre l’aigle
et le charognard, faire de Prométhée, le Voleur de Feu, un fantoche
rêvant les sommets qu’il
n’atteindra jamais. Mais il existe dans la déviation magique des
erreurs commises par des personnalités
tentées par la volonté de puissance personnelle.
Ce
fut ce qui arriva à J.B. alors dirigeant du mouvement Les fils du
Feu et signataire de la charte de l’Internationale luciférienne.
Pour les inspecteurs des Renseignements généraux du Puy-de-Dôme
Les Fils du Feu étaient avant tout les maîtres doctrinaires de
nombreuses organisations d’extrême-droite. Mais l’initiation ne
s’arrêtait pas à la conférence ou à la table ronde sur les
origines mythologiques de l’Occident ou sur la manière de vaincre
la peur… L’initiation, du moins
la pseudo – initiation, avait aussi lieu sur le terrain, tout près
du camp d’entraînement militaire de la Fontaine du Berger, à
quelque dix kilomètres de Clermont-Ferrand.
C’est
dans ce lieu réservé, inaccessible pour le simple touriste ou le
promeneur du dimanche, que se réunissaient au cours de l’été
1975 une trentaine de jeunes portant treillis et rangers, la matraque
et la lance de bois à la main, afin de subir un entraînement digne
des commandos militaires.
Dirigés
par d’anciens mercenaires parachutistes, ce groupe d’action se
préparait, au delà de la guérilla urbaine, au renouvellement
magique annoncé par Les Fils du Feu présents sur le terrain.
Chemise
bleue ornée du casque spartiate, J.B. et ses adeptes étaient là
pour « réveiller dans chaque militant l’âme antique et
prométhéenne de l’Empire polaire »…
Ce
discours, identique à celui de l’Ordre vert qui avait aussi ses
Légions de Mithra, se traduisait en actes précis au cours de
rituels guerriers. Par exemple avant l’entraînement, les lances de
bois (qui servirent aux militants d’Ordre
nouveau à la Mutualité) étaient marquées des runes magiques du
combat à l’aide du sang de chaque militant. Cette innovation
luciférienne n’était pas pour déplaire aux nostalgiques du
nazisme ivres d’un lyrisme guerrier anachronique. Trois figures
runiques revenaient constamment sur les armes d’entraînement :
Odin, le combat et le Pouvoir, tracée au sang à l’endroit précis
où la main se referme sur le manche de l’arme. [...]
Allées et venues
mystérieuses, liaisons constantes entre Bruxelles, Cologne et Paris…
les lucifériens préparaient dans l’ombre les accords secrets
qu’ils allaient signer à Madrid, avec Lopez Rega, mage et ancien
ministre de Juan Peron. [...]
Pour
les traditionalistes, lorsque les
sociétés économiques se seront effondrées, resteront
seulement les valeurs occultes qui se partageront la suprématie du
globe… Alors l’homme devra choisir entre la Voie luciférienne et
les Voies mystiques.
C’est
à travers de nombreux bouleversements, des remises en question
violentes, les tentatives magiques les plus folles, que l’aventure
occulte, apparemment inextricable, laissera passer au grand jour les
pionniers du Nouvel Âge, la race mentale dont parlais Julius Evola,
celle qui osera enfin regarder le soleil en face.
Alors
le « petit homme », celui qui s’accroche encore à
l’égalitarisme, à la chaude promiscuité, aux délires génétiques
sécurisant la race qui meurt, à sa minuscule volonté de puissance,
ce petit homme ne sera plus qu’un rêve sans importance, une ombre
qui passe, privée de la noblesse intérieure qui fera l’homme
futur. Dans l’enseignement luciférien, il est dit que « la foudre
préservera seulement ce qui lui ressemble ».
Jean-Paul
Bourre