Léon
de Poncins, l'ennemi des sociétés secrètes mondialistes, était-il
disciple de René Guénon et de Julius Evola ?
Wikipédia
« Les
Éditions Pardes ont publié en 1987, écrit Jean Vaquié, sous le titre Ecrits
sur la Franc-Maçonnerie, un recueil contenant huit articles de
Julius Evola. Ces huit articles sont de parution ancienne puisqu'ils
s'échelonnent entre 1937 et 1942. Selon la présentation qui en est
faite au dos de la couverture, ils «ne relèvent ni de l'apologie,
ni du dénigrement systématique... ils se veulent une contribution à
l'étude d'un domaine initiatique».
Le
recueil ainsi constitué contient plusieurs appendices dont l'un
s'intitule « Léon de Poncins, un Contre-Révolutionnaire Intégral
». C'est ce travail qui va retenir notre attention. Cet exposé,
d'ailleurs très dense et renseigné avec soin, se termine ainsi :
«
Au terme de cette trop brève étude sur Léon de Poncins, nous avons
le sentiment que les éléments réunis ici sont suffisants pour
déplaire, sinon à tous, du moins à beaucoup. Les intégristes
n'apprécieront pas que nous ayons exhumé des textes d'un de leurs
auteurs de prédilection (officiellement, en tous cas) où il est
très favorablement question de Guénon. Ces textes, nous ne les
avons pourtant pas inventés, et il suffit d'aller les consulter là
où c'est possible, dans les bibliothèques.
«
Seul Tempête sur le Monde (l'un des tous premiers livres de
L. de P.) a été utilisé ici, mais le lecteur intéressé pourra
facilement trouver d'autres livres de Léon de Poncins où abondent
les références à Guénon. Dérangeant pour certains, un rappel de
ce type montre en fait que, derrière l'inévitable étroitesse ou
insuffisance des travaux d'un archiviste ou d'un documentaliste de la
subversion il y avait un homme possédant une solide formation
doctrinale, capable de prendre du recul par rapport à l'événement
et de
regarder
loin ».
Cet
homme « possédant une solide formation doctrinale et capable de
regarder loin », c'est Léon de Poncins. Tout l'ensemble du chapitre
nous le présente comme "regardant loin" parce qu'il n'a
pas craint de puiser sa doctrine "contre-révolutionnaire
intégrale" à la source des écrits de Guénon dont il a su
prévoir le grand retentissement. Bref on nous en fait un disciple de
Guénon. Mais aussi un disciple d'Evola auquel il eut également
recours et qu'il cite longuement.
Il
y a là une erreur
d'appréciation que nous
voudrions corriger. Et si nos amis de Chiré m'ont demandé de
rédiger une note rectificative, c'est parce que j'ai moi-même
fréquenté Léon de Poncins pendant de nombreuses années,
travaillant avec lui sur les mêmes sujets. Je connais donc bien son
jugement sur R. Guénon et sur J. Evola. Et je dois dire tout de
suite qu'il aurait été très désagréablement surpris à la
lecture de l'appendice qui termine le recueil que nous venons de
désigner. Et il n'aurait pas manqué, j'en suis certain, de rédiger
lui-même une "note rectificative", qui aurait peut-être
été plus complète mais qui n'aurait pas été substantiellement
différente.
Replaçons-nous
donc par la pensée dans les conditions où se trouvaient les
intellectuels "nationaux" et catholiques pendant la période
qui est délimitée approximativement par les dates de parution des
articles de J. Evola qui font l'objet du recueil des Editions Pardès,
c'est-à-dire de 1937 à 1942. La doctrine de R. Guénon possède,
comme toutes les doctrines fortement homogènes et très élaborées,
une partie critique et une partie constructive. Ce penseur, comme
bien d'autres, s'élève contre une certaine forme de la société
avant de proposer un système de remplacement. On avait vu de même,
au XIXe siècle, Karl Marx procéder à la critique du capitalisme
avant d'édifier le système collectiviste destiné, dans son esprit,
à le remplacer.
La
Critique que R. Guénon adresse au monde moderne est double. Il lui
fait deux procès distincts. Le premier vise le matérialisme de la
société contemporaine. Le second a pour objectif une certaine forme
de spiritualisme dont elle s'imprègne rapidement. Reprenons
séparément ces deux griefs en essayant de définir leurs fondements bphilosophiques dans la doctrine guénonienne.
R.
Guénon reproche au monde moderne son matérialisme et sa
désacralisation. Et il les explique ainsi. Il écrit que le monde
moderne est le siège d'une véritable solidification. D'où provient
cette solidification? Si le monde se solidifie c'est parce qu'il est
parvenu à la fin d'un cycle cosmique. Au début de chaque cycle
l'univers apparaît dans un état à prédominance spirituelle et
sacrale. Puis il va en se dégradant, c'est-à-dire en se
déspiritualisant et donc en se matérialisant. De sorte qu'à la fin
du cycle, quand arrive l'âge final appelé âge sombre l'univers est
dans un état de matérialisation irréversible. Tel est précisément
le stade qui est atteint par notre monde moderne. Il est voisin de la
solidification. C'est la désacralisation matérialiste qui y
prédomine, d'où son hyper-technicité, son mercantilisme et son
collectivisme massifiant. Tels sont les grands traits de la
construction guénonienne en ce qui concerne la critique du monde
moderne.
En
même temps qu'il s'élève contre le matérialisme, R. Guénon fait
le procès d'une certaine forme de spiritualisme. Il a en vue un faux
spiritualisme qui se présente sous deux formes : la théosophie et
le spiritisme, lesquels font l'objet de deux ouvrages différents :
Le Théosophisme, Histoire
d'une Pseudo-Religion
(1921) et L'Erreur Spirite
(1923). Ces deux ouvrages figurant parmi ses tout premiers livres.
C'est par eux que le public catholique a commencé à connaître
Guénon.
R.
Guénon explique que ces deux faux spiritualismes en pleine expansion
sont de faux antidotes au matérialisme moderne. Ils ne sont que des
caricatures du vrai spiritualisme que lui-même se propose d'exposer
longuement dans ses travaux ultérieurs. Le "vrai spiritualisme"
de René Guénon s'inspire de ce qu'il appelle la "Grande
Tradition Universelle et Primordiale" dont nous verrons plus
loin quelle est la véritable valeur. On comprend très bien de la
part de Guénon, cette critique préalable. Elle était destinée à
faire place nette. Il était nécessaire en effet qu'avant de
répandre son propre système spiritualiste, Guénon règle leurs
comptes aux deux faux spiritualismes qui constituaient ses deux
principaux concurrents à savoir la théosophie et le spiritisme. Et
il faut reconnaître que son éreintement fut magistral. Il les a
fait taire pour de nombreuses années. Devant cette critique du
monde moderne dans son matérialisme et dans les
faux
spiritualismes, les nationaux, et parmi eux les catholiques, furent
très admiratifs. Pouvait-on souhaiter un auxiliaire plus
avantageux que l'auteur de ces deux livres magistraux ? Voilà un
homme qui s'attaque simultanément à la dégénérescence
matérialiste et à l'invasion de l'occultisme hindouisant lesquelles
constituent précisément leurs deux adversaires les plus
redoutables. Et cette attaque, il la fonde sur "la Tradition",
ce qui n'était pas non plus pour leur déplaire, si du moins ils
n'étaient pas trop regardants quant à la définition de cette
tradition. Le mot de "tradition" en effet exerçait
déjà, sur les nationaux et les catholiques, son effet de prestige
et d'autorité. Effet psychologique vague mais puissant
qui reste encore actuel et que nous connaissons bien.
Il
faut reconnaître que, si les écrivains catholiques et leurs
conseillers théologiques de l'époque avaient étudié avec plus
de soin les fondements de la fameuse "tradition universelle"
au nom de laquelle Guénon prononçait son réquisitoire contre le
matérialisme et contre les pseudo-spiritualismes", ils auraient
constaté que cette prétendue tradition n'était pas autre chose que
le védantisme, lequel diffère essentiellement de la Tradition
apostolique dont l'Eglise est "gardienne et maîtresse"
(custos et magistra) et qu'eux-mêmes étaient censés
défendre.
On
voit que les positions relatives des doctrines en présence étaient
assez mal définies. Cette imprécision générale était due au fait
que Guénon, finalement, avançait masqué. Il avait
ouvertement fait la critique du monde moderne, mais on ne connaissait
la partie positive de ses doctrines que par des ouvrages assez
énigmatiques et d'accès difficile qui étaient lus seulement par
ceux que l'on appelait alors les occultistes et qui allaient devenir,
après la guerre de 39-45, les "ésotérites".
Quoiqu'il
en soit de ces incertitudes, ce qui est sûr c'est que L. de Poncins
n'a utilisé que la partie
critique de l'œuvre
guénonienne. Il est facile de constater qu'il ne lui a emprunté que
ses griefs contre le monde
moderne. Griefs que Guénon avait en commun avec les nationaux et les
catholiques, et qu'il exprimait seulement d'une manière un peu
différente. Jamais Poncins n'a rien puisé dans la construction
hindouiste ou islamique de Guénon, dans ses développements
ésotériques et gnostiques bien qu'ils constituent la part la plus
importante et la plus essentielle de son œuvre. On peut affirmer que
L. de Poncins a ignoré le guénonisme.
Il
est un point de doctrine tout à fait capital qui permet de constater
la pleine liberté et l'indépendance d'esprit que L. de Poncins a
conservé à l'égard de Guénon. C'est le jugement porté, par l'un
et par l'autre des deux hommes, sur la maçonnerie spiritualiste.
Comment cette question se pose-t-elle ? Voyons d'abord le point de
vue de Guénon et ses fondements philosophiques ou plutôt
historiques.
La
thèse de Guénon était celle-ci. Il acceptait la distinction que
les maçons établissent eux-mêmes entre, d'une part les loges
rationalistes et athées et d'autre part les loges spiritualistes.
C'est une distinction tout à fait classique dans la maçonnerie.
Mais Guénon considère que la filière initiatique est irréprochable
dans l'une et l'autre maçonneries. Dans les deux cas l'initiation,
qui est conférée, présente les indispensables caractères
d'archaïsme. Dans les deux branches, l'origine de l'initiation se
perd dans la nuit des temps, donc elle est de fondation
"non-humaine". Par conséquent, pour Guénon, dès lors que
la loge est "régulière" et que les rites sont
rigoureusement respectés, l'initiation maçonnique est authentique
et il n'y a pas lieu de distinguer entre maçonnerie rationaliste et
maçonnerie spiritualiste.
D'après
Guénon, ce qui est répréhensible, dans les loges rationalistes et
athées, ce n'est pas l'initiation, c'est l'enseignement doctrinal.
On y impose une orientation de type encyclopédique, révolutionnaire,
scientiste et matérialiste. C'est cela qui est mauvais, très
mauvais même car les loges rationalistes, qui ne reconnaissent pas
de Dieu, en arrivent à accélérer la "solidification" du
monde. Mais la régularité de l'initiation est inattaquable
nonobstant les doctrines erronées qui l'accompagnent.
Les
loges spiritualistes, au contraire, toujours d'après Guénon, sont
irréprochables autant pour leurs doctrines, qui sont de nature
religieuse, que pour leur initiation qui est d'origine immémoriale
et donc non-humaine. On comprend dès lors que R. Guénon se soit
toujours trouvé en accord fondamental avec la maçonnerie
spiritualiste. Il en a fait partie et il y a toujours conservé des
amis, des défenseurs et même des disciples nombreux.
Ainsi
peut-on résumer la doctrine de Guénon concernant la maçonnerie.
Mais il est bien évident qu'il s'agit là d'un schéma. La
distinction des deux courants philosophiques n'est contestée par
personne, dans son principe, mais dans la pratique elle ne se
présente pas toujours d'une manière tranchée. Car, du fait de sa
tolérance, la maçonnerie abrite des tendances très diverses et
très nuancées.
Voyons
maintenant le point de vue de Poncins. De même qu'il avait appelé
nGuénon à l'aide contre le monde moderne, il aurait pu le citer
aussi dans ses développements contre la maçonnerie rationaliste
qu'il combattait comme lui. Mais il s'en est bien gardé. Poncins
engloba toujours dans la même réprobation les loges athées
et les loges théistes dans lesquelles il ne percevait qu'une
habile répartition de la clientèle. De fait, contrairement à
Guénon, Poncins a toujours été détesté dans l'un et l'autre
courants maçonniques. Il a été combattu par la maçonnerie toutes
tendances confondues. Et cela essentiellement parce qu'il n'y a
jamais été considéré comme un disciple de Guénon si peu que ce
soit.
Mais
alors pourquoi L. de Poncins, qui vouait aux deux courants
maçonniques une détestation égale, n'a-t-il pas combattu la
religion gnostique élaborée par les loges spiritualistes avec
la même ardeur qu'il mettait à critiquer les doctrines
révolutionnaires des loges athées? Pourquoi s'en est-il tenu à
dévoiler les menées anti-nationales de la maçonnerie rationaliste
et socialiste ? Il y a là une objection que j'ai quelquefois entendu
formuler et à laquelle il faut répondre.
Notre
"ami était parfaitement conscient de la nécessité du
combat dans l'ordre religieux. Il savait très bien que si
l'ordre temporel était attaqué, l'ordre spirituel l'était aussi.
Et s'il ne s'est pas lancé lui-même expressément dans la défense
de l'Église c'est pour deux raisons.
La
première vient de ce qu'il avait reçu, de la part de plusieurs
ecclésiastiques, le conseil pressant de se tenir à l'écart
des discussions religieuses pour lesquelles, lui disait-on, il
n'avait ni compétence ni autorité. Il s'abstint donc, réservant
son activité aux limites du temporel. A eux seuls les titres de ses
livres témoignent de la sectorisation qu'il s'imposa. Citons par
exemple La Franc-Maçonnerie contre la France. Il n'a rien
écrit sur la maçonnerie contre l'Eglise. L'un de ses premiers
livres avait été La S.D.N., Super-Etat Maçonnique. Et
jamais il n'a traité le sujet de la maçonnerie comme Super-Eglise.
Il laissait au clergé, qui paraissait encore à cette époque
bien charpenté et bien décidé, le soin de défendre la cause
religieuse. La répartition des tâches semblait logique.
La
seconde raison pour laquelle L. de Poncins s'abstint longtemps
d'attaquer la maçonnerie sur le terrain spiritualiste et religieux
c'est l'existence, à Paris, d'un organe spécialisé : la R.I.S.S
(Revue Internationale des
Sociétés Secrètes) de
Monseigneur Jouin. Poncins
entretenait avec lui d'excellents
rapports. Mais il était
parfaitement conscient qu'une revue, consacrée à la publication de
documents maçonniques et occultistes s'exposait en permanence à se
laisser circonvenir par des agents de toutes sortes. Je lui ai
souvent entendu exprimer quelques réserves de détail. Dans
l'ensemble cependant il était très
élogieux non seulement pour Mgr Jouin lui-même mais aussi pour la
majorité de ses collaborateurs.
Ces
deux raisons font qu'il n'éprouva nul besoin de se lancer en
personne dans la défense de la vraie Religion, ni contre les
attaques directes des rationalistes, ni contre les attaques
indirectes des spiritualistes néo-gnostiques. Il fallut la crise
conciliaire pour que L. de Poncins abandonne la discipline qu'il
s'était imposée. A partir de ce moment, les pressions
judéo-maçonniques pour faire dévier l'Eglise devinrent si fortes
et la défense de l'orthodoxie par des religieux spécialisés ou
non, se révéla si déficiente et même si inexistante qu'il se
sentit obligé d'entrer personnellement dans l'arène.
Deux
ouvrages témoignent de cet élargissement de son action au domaine
religieux de la maçonnerie spiritualiste. Pendant le Concile, il
publia et distribua Le Problème des Juifs au Concile. Puis en
1970, aux éditions de l'Ordre Français, il fit paraître un ouvrage
très clair et très solide : Christianisme et Franc-Maçonnerie
(1970), dont il existe une réédition à la D.P.F. de Chiré en
1975. Livre dans lequel nous recommandons le chapitre VII qui a pour
titre « La théologie occulte et l'influence gnostique ».
Tout cela aurait-il pu être écrit par un disciple de Guénon ? On
voit qu'il aurait été aussi compétent en matière spirituelle
qu'il l'avait été en matière temporelle si les deux circonstances
que nous venons de relater ne l'avaient arrêté.
Pour
nous résumer sur les rapports de Poncins avec Guénon, nous pouvons
dire ceci. Avant la guerre de 39-45, pendant les années de lutte de
toute la Droite contre les "menées anti-nationales" comme
l'on disait alors, L. de Poncins avait fait appel à quelques
citations de R. Guénon pour renforcer, par un témoignage extérieur,
son argumentation contre le monde moderne. Mais quant à se nourrir
de la doctrine guénonienne, il en était très loin. Bien sûr, il
lisait ces livres-là quand il en apercevait de nouveaux dans les
devantures des librairies, mais il ne les recherchait certes pas. Il
les trouvait d'ailleurs parfaitement indigestes et il avait du mal
à les finir. Son aversion pour l'auteur allait en grandissant.
Il
finit par exploser littéralement à la lecture du Règne de la Quantité et les Signes des Temps.
C'était en 1945. Il m'avait demandé de lui prêter mon exemplaire
et nous avions convenu que je passerai le reprendre à l'hôtel de la
rue Jacob (non loin de la rue des Saints-Pères) où il descendait
presque toujours quand il venait à Paris. Il me le rendit avec des
commentaires tout ce qu'il y a de plus désapprobateurs. Et il me
confia même qu'il était furieux contre Guénon qui finalement,
l'avait trompé.
Depuis
la lecture de Règne de la Quantité L. de Poncins n'eut plus
le moindre doute sur l'affiliation initiatique de R. Guénon
puisque son discours différait si peu de celui des maçons
spiritualistes.
Demandons-nous
maintenant quel type de relations L. de Poncins a bien pu entretenir
avec Julius Evola et avec son oeuvre. Ces relations ont suivi le même
schéma qu'avec Guénon, malgré une petite différence d'ordre
personnel que nous noterons au passage. Pour comprendre les rapports
des deux hommes, il faut savoir qu'il existait deux Evola dans
le même personnage. Il y avait un Evola exotérique,
c'est-à-dire politique et un Evola ésotérique, plein
de sousentendus d'ordre religieux.
L'Evola
exotérique est l'ami de l'ordre. C'est le contre-révolutionnaire. C'est
l'homme politique. Et c'est à lui que L. de Poncins demandait, pour sa
revue (Contre-Révolution, Revue Internationale d'Etudes Sociales,
Paris.), des articles comme par exemple celui de décembre 1938 : «
Technique de la Subversion » ou « Les instruments de la Guerre Occulte
», dans lequel il nous décrit l'action de ce qu'il appelle « les forces
secrètes de l'anti-tradition », forces secrètes qui ne sont pas autre
chose que les loges rationalistes, athées et révolutionnaires. On
retrouve la même position que chez Guénon (note de Bouddhanar : selon Guénon, les forces secrètes qui œuvrent à l'avènement de la contre-tradition sont d'une nature beaucoup plus redoutable que de simples idées révolutionnaires, rationalistes, athées...).
Même position aussi en ce qui concerne les "faux spiritualismes" que J.
Evola décrit dans son livre Masques et Visages du Spiritualisme
Contemporain (Editions de l'Homme). Avec cet Evola exotérique, Poncins,
incontestablement se plaisait, alors que le personnage de Guénon ne l'a
jamais séduit. Et il est tout à fait exact qu'il admirait beaucoup la
force de caractère et le stoïcisme d'Evola et qu'il aimait à lui rendre
visite à Rome dans la vieille maison paternelle où il était né et où il
devait mourir.
Mais
il y avait aussi un autre Evola, celui qui cultivait l'ésotérisme
graalien, gibelin et aussi bouddhiste, celui qui est devenu l'un des
grands doctrinaires de la nouvelle gnose, avec des ouvrages comme
Chevaucher le Tigre (à la Colombe), La Métaphysique du sexe (chez Payot), Le Mythe du Graal et l'Idée Impériale
Gibeline (Éditions Traditionnel-les), La Tradition Hermétique
(également aux Éditions Traditionnelles), Le Yoga Tantrique
(chez Fayard), La Doctrine de l'Éveil (chez
Arché-Milano).
Cet
Evola ésotérique, je puis dire que Poncins a voulu l'ignorer et, à
cause de son amitié pour l'homme, il souffrait mal qu'on lui en
parle, ce qui prouve qu'il situait très exactement l'œuvre. Il
était totalement imperméable à ce genre de raisonnement. C'est une
pensée qui lui était tout à fait étrangère. Il ne lui a jamais
rien emprunté. Il n'a pas subi son influence. Mais en mesurait-il la
nocivité ? Je le crois, car il se fermait dès que l'on commençait
à lui parler de l'ésotérisme d'Evola. Finalement, il avait été
trompé par
lui comme par Guénon, mais il avait mis beaucoup plus longtemps à
en prendre conscience.
Nous
terminerons cette "note rectificative" par la conclusion
suivante. On serait totalement dans l'erreur si l'on prétendait
situer Léon de Poncins dans la mouvance de R. Guénon et de J.
Evola. Maintenons, car telle est la vérité, qu'il appartient
pleinement à l'École du légitimisme classique. »