Monday, September 21, 2009

Les brouteurs


Au début du christianisme, des ascètes ne se souciaient pas des crises de l’empire romain. Seulement préoccupés de spiritualité, ils vivaient nus en pleine nature et ne nourrissaient que de plantes sauvages. Ils étaient appelés les "brouteurs" (en grec, "boskoï").

Jacques Lacarrière, dans son livre "Les hommes ivres de Dieu", mentionne plusieurs témoignages relatifs aux brouteurs.
Témoignage de saint Ephrem :

"Ils paissent avec les bêtes sauvages comme les cerfs. Leur table est toujours prête, toujours couverte, car ils se nourrissent de racines et des herbes que le sol produit naturellement."

Plus tard, Théodoret décrira à son tour la vie des brouteurs de Syrie. De Jacques, par exemple, futur évêque de Nisibe, qui "passait dans les forêts le printemps, l’été et l’automne, n’ayant pour couverture que le ciel, et qui, lorsque l’hiver était venu, se retirait dans une caverne pour y trouver un peu de couvert. Il ne se nourrissait que de ce que la terre produit d’elle-même, sans être semée ni cultivée, cueillait les fruits de quelques arbres sauvages et des herbes qui ressemblent un peu à nos légumes et en mangeaient seulement autant que son corps en avaient besoin pour le soutien de sa vie."

Plus tard, encore, Evagre le Scolastique mentionnera dans son "Histoire ecclésiastique", entre autres ascètes, des hommes "qui ont choisi un désert exposé aux ardeurs du soleil, pour y vivre. Il y a des hommes et des femmes qui, y étant entrés presque nus, y méprisent toutes les saisons, la rigueur du froid comme l’excès de la chaleur. Ils dédaignent d’user des aliments dont usent les autres hommes et se contentent de paître comme les bêtes. Ils ont même beaucoup de la façon extérieure des bêtes, car dès qu’ils voient un homme, ils s’enfuient et, si on les poursuit, ils s’échappent avec une vitesse incroyable et se cachent en des lieux inaccessibles."

Quant à Jean Moschos, il écrit au 6ème siècle, à l’"âge d’or" des brouteurs où le fait de passer sa vie à brouter l’herbe paraît si naturel qu’il se contente de le mentionner, comme on parlerait aujourd’hui de végétariens !

Il semble, d’après certains passages du "Pré spirituel", que les brouteurs étaient particulièrement nombreux le long de la mer Morte, dans les déserts de Juda, du kédron et de Kalamon.
"Nous étions trois brouteurs, lui raconte un anachorète rencontré en chemin, au-delà de la mer Morte, aux environs de Bessimon, et nous nous promenions dans la montagne et voilà qu’en dessous de nous, un autre brouteur se promenait sur le bord de la mer."

Plus loin, il mentionne un certain "apa Sophrone, brouteur, qui vécut près de la mer Morte tout nu durant soixante-dix ans, en mangeant seulement des herbes".

 

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